
Conception scénique laissant à désirer, mais aspect vocal plutôt convaincant.
par Frank FREDENRICH
On a pu le constater récemment à Genève avec Il Barbiere di Siviglia, certaines propositions scénographiques assurent pour ainsi dire à elles seules la réussite d’un spectacle. Mais le contraire n’est pas à exclure comme le démontre la Salomé généreusement sifflée par le public florentin qui n’est pourtant pas réputé comme étant le plus conservateur d’Italie.
C’est qu’inscrire ce récit tragique tout d’abord dans un vaste espace représentant la salle des coffres d’une banque dans laquelle se promènent entre autres quelques figurants en tutu ne peut dès l’entrée en matière que laisser songeur quant à la pertinence de la conception du scénographe Radu Boruzescu ou de Miruna Boruzescu qui signe les costumes.
Assez mal inaugurée, la soirée se poursuit avec une scène un peu plus cohérente avec un Jochanaan dans un univers rappelant l’histoire de Simon du désert, avant une danse des Sept voiles qui ne figurera pas parmi les plus mémorables puisque peu susceptible de convaincre qui que ce soit du pouvoir érotique de l’héroïne, malgré quelques gestes maladroitement suggestifs, alors que Janice Baird avait les moyens de mériter une chorégraphie un peu plus intéressante. Si l’on ajoute quelques protagonistes paraissant parodier l’imagerie exotique d’Hergé et une mise en place des chanteurs ne les mettant que rarement en évidence, on ne peut que regretter le peu de cohérence de la conception signée par un metteur en scène généralement beaucoup mieux inspiré, puisqu’il s’agissait de Robert Carsen.

Restait heureusement à apprécier l’aspect vocal plutôt convaincant avec Janice Baird dramaturgiquement crédible et certes « attractive » diraient ses compatriotes, et si elle laissait entrevoir quelques aigus tendus au début de la représentation, elle s’avérait ensuite totalement engagée dans le rôle qu’elle servait avec une voix puissante et donnait un relief saisissant à son personnage malgré les lacunes de la mise en scène. Hérode n’était autre que Kim Begley, dont la stature vocale ne pouvait que rendre crédible son personnage, alors que Mark Doss (Jochanaan), Irina Mishura (Herodias) et Mark Milhofer (Narraboth) constituaient un « cast » d’excellent niveau qui s’inscrivaient dans la réussite musicale de la soirée puisque Ralf Weikert dirigeait l’Orchestre du Maggio Musicale Fiorentino avec un souci constant de tension dramatique, servant ainsi la richesse sonore du chef-d’œuvre straussien.
Frank Fredenrich